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2022, 3 mars : La Brisure du couplet [Journée d'étude]

Danièle James-Raoul Yannick Mosset

Journée d’étude sur La brisure du couplet

UBM, 3 mars 2022, 14h-17h30, s. H 006 et s. 109 et 4 mars 2022, 9h-11h30, s. H 009

L’apparition du couplet d’octosyllabes dits ou plutôt lus devant un petit comité aristocratique, notamment dans le cas du genre romanesque a constitué, en regard des décasyllabes chantés ou psalmodiés des chansons de geste, une véritable révolution de l’écriture poétique : « cette forme métrique simple laisse, par une sorte de transparence du langage, l’attention se fixer presque tout entière sur le contenu du récit[1] ». À vrai dire, la tendance qu’a ce vers à se faire oublier n’a fait que s’amplifier au fil des siècles… Même si nos connaissances en versification médiévale sont fort réduites – trop réduites ! –, les historiens du vers pensent que la mélodie octosyllabique, jusqu’à la seconde moitié du XIIe siècle, est en chapeau de gendarme, nettement appuyée par une pause sur la première rime, que redouble une pause encore plus marquée au vers suivant, en fin de phrase ou de proposition[2]. Il existe à la fois une forte autonomie du vers et une solide cohésion qui lie deux octosyllabes à rimes plates et fait d’eux un couplet, c’est-à-dire une unité globale rimique, rythmique, syntaxique et sémantique (ces deux derniers points étant à nuancer dans le cas où ils sont constitués de compléments non essentiels). Nous ne disposons pas de renseignements donnés sur le sujet dans les textes médiévaux ou dans les arts poétiques médiolatins. 

Le phénomène de brisure de couplet modifie ce schéma canonique, presque toujours de mise dans les premiers textes, en décalant, du fait de la syntaxe qui l’impose, la longue suspension attendue au bout de la répétition de la rime et en l’introduisant comme à contretemps, plus tôt, après la première rime. Il en résulte dans la suite des vers courts ainsi composés une tonalité autre : se fait entendre une rupture subtile, plus ou moins appuyée, dans la régularité de la musique octosyllabique attendue et prédéterminée, connue des auditeurs et par eux reconnaissable. La brisure du couplet s’observe dès les premiers textes en octosyllabes de langue française mais elle y est rare, elle demeure l’exception, « la cohésion des deux vers accouplés étant, en général, un indice d’ancienneté[3] ». Cette libération du vers se développe à partir du milieu du XIIe siècle et touche d’abord les vers courts[4]. Au début du XIIIe siècle, entre 1200 et 1210, elle est suffisamment répandue pour que Wolfram von Eschenbach la mentionne dans son Parzival quand il évoque un écrivain devant connaître « toutes les règles de la versification : comment trouver des rimes et unir deux vers par le sens et la rime ou répartir le sens et la rime entre deux phrases différentes[5] ».

Lors de la première session, le jeudi après-midi, des binômes librement constitués s’attelleront à établir les relevés sur les textes choisis et à identifier les éventuels questionnements méthodologiques qui pourraient surgir. Les médiévistes musiciens présents s’essaieront à modaliser musicalement en rythmes, en notes, différents types d’octosyllabes. Lors de la seconde session, le vendredi matin, nous confronterons nos résultats et les analyserons ensemble.

L’idée est de voir si la brisure du couplet est un procédé de versification qui a connu une extension, un développement, une mode, s’il est caractéristique d’un auteur, d’une œuvre, d’un genre littéraire. Comment est-il employé ? Quel marquage constitue-t-il ? Est-il une rupture mélodique, rythmique, prosodique ? Certaines brisures sont-elles plus sensibles que d’autres ? Peut-on établir, en définitive, une définition rigoureuse ?

Organisation et contact

Danièle James-Raoul (UBM / IUF)

Yannick Mosset (U. Toulon)


[1] M. Zink, « Une mutation de la conscience littéraire : le langage romanesque à travers des exemples français du XIIe siècle », Cahiers de Civilisation Médiévale, 24, 1981, p. 6. 

[2] Voir G. Lote, Histoire du vers français, Première partie : Le Moyen Âge, Paris, Boivin et Cie, 1949, t. I, p. 277.

[3] Voir P. Meyer, « Le couplet de deux vers », Romania, 23, 1894, p. 1-35.

[4] Id., p. 16.

[5] Wolfram von Eschenbach, Parzival, trad. et comm. D. Buschinger, W. Spiewok, J.-M. Pastré, Paris, UGE, 10/18, 1989, L. VI, 337, p. 244.

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